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    Les bons vivants entrent en résistance

    MOYEN
    Écoute 11/2021
    Freunde am Tisch
    © DisobeyArt/istock
    Von Christian Eidenschenck

    Aujourd’hui, la planète se convertit de plus en plus au le culteKult, Religionculte de la santé. Mais certains, en France, semblent vouloir résister. Alors, les Français, des le bon vivantLebenskünstler, Schlemmerbons vivants ? Vaste question. L’histoire nous apprend que les Gaulois appréciaient les bonnes choses. Dès le IIe siècle avant Jésus-Christ, les Romains construisent des bateaux contenant jusqu’à 10 000 amphores pour exporter leur vin en Gaule. en échangeim GegenzugEn échange, nos ancêtres inonder deüberschwemmen mitinondent Rome inonder deüberschwemmen mitde jambons.

    Au Moyen Âge, les gourmands avoir tout fauxalles falsch machenont tout faux : la la gourmandiseSchlemmereigourmandise est responsable du le péché originelErbsündepéché originel et elle conduit à la la luxureWollustluxure. Il faudra attendre la Renaissance, avec le carpe diem cher aux épicuriens, pour extirpernehmen, befreienextirper des plaisirs terrestres la peur de l’l’enfer (m)Hölleenfer.

    Les plus belles pages du plaisir

    le saint patronKirchenpatronLe saint patron des bons vivants est l’humaniste François Rabelais. Dans ses romans, les géants Pantagruel et Gargantua font le tour des universités de France et combattent des ennemis aussi ridicules que méchants. Les orgies burlesquegroteskburlesques, grivois,eanzüglichgrivoises et glouton,neverfressengloutonnes dont les romans être truffé,e degespickt sein mitsont truffés ont offert à la langue française les adjectifs « pantagruéliquegigantisch, übergroßpantagruélique », « gargantuesqueschlemmerhaftgargantuesque » et « rabelaisien,nederb, lebensfrohrabelaisien ».

    Louis XIV a un appétit, justement, pantagruélique. Véritable le goinfreVielfraßgoinfre, le roi souffre de la la goutteGichtgoutte. Il est sujet à des crises de le dégoûtEkeldégoût. Au cours du XVIIIe siècle, le goût se raffine et la passion de la la bonne chèregutes Essenbonne chère devient un marqueur social de la noblesse.

    « Les animaux se repaîtresich sattfressense repaissent ; l’homme mange ; l’l’homme (m) d’espritMann von Geisthomme d’esprit seul sait manger. » Né en 1755, Anthelme Brillat- Savarin va redéfinir ce qu’on entend par gourmandise : une qualité sociale, un le savoir-vivreLebensart, Benehmensavoir-vivre. La gastronomie devient une vraie science qui se nourrit aussi d’anecdotes, de méditations, de chansons à boire, d’aphorismes.

    Porté par l’éloquence gourmande de Brillat-Savarin et d’autres, l’art de la bonne chère devient patrimoine national. Les élites du XIXe siècle se passionnent pour les les plaisirs (m) de la tableTafelfreudenplaisirs de la table.

    Vers la fin de sa vie, Alexandre Dumas écrit même son Grand Dictionnaire de cuisine, avec 3 000 recettes. Pendant qu’à Paris, le compositeur Gioachino Rossini crée la recette du le tournedosTournedos, runde Lendenschnittetournedos qui portera son nom, Maupassant déclare : « De toutes les passions, la seule vraiment respectable me paraît être la gourmandise ».

    Le vrai bon vivant pense que la vie mérite de collectionner tous les plaisirs. La la convivialitéGeselligkeitconvivialité, l’humour et l’érotisme en font aussi partie. Un amour de la vie qui se moquer de qceiner S. spottense moque parfois se moquer de qceiner S. spottende la morale.

    le tournageDreharbeitenTournages et la bonne tablegutes Restaurantbonnes tables

    Le cinéma dresserhier: zeichnena dressé de beaux portraits de ces le jouisseurGenießerjouisseurs rebelles et épris,e de libertéfreiheitsliebendépris de liberté. Dans Alexandre le Bienheureux, avec Philippe Noiret, Alexandre décide de rester au lit après la mort de son épouse tyrannique. Il accrocherhängenaccroche saucisson, vin rouge et baguette à des la poulieSeilrollepoulies, à portée de mainin Reichweiteà portée de main. Le cinéaste Claude Chabrol, bon vivant notoire, choisissait ses lieux de tournage en fonction deabhängig vonen fonction des bonnes tables dans la région. Claude Sautet a donné de la France l’image d’un pays dont la principale occupation est de tomber amoureux en se servant un énièmex-te,r,sénième verre de vin, la cigarette à la main, après avoir commandé un le coq au vinHähnchen in Rotweincoq au vin. À la pause déjeuner.

    Cette France-là, celle de Gabin, Sautet, Lautner et Chabrol avoir du plomb dans l’aileeinen schweren Stand habena du plomb dans l’aile. On ne boit plus de beaujolais pendant la pause déjeuner, on réduit la consommation de viande et de tabac… Mais les Français ne sont pas, pour autant, devenus une la tribuStammtribu de le rabat-joieMiesepeterrabat-joie au le régimeDiätrégime. Selon une étude de l’OCDE de 2018, ils restent, avec 2 heures et 13 minutes par jour, les champions du temps passé à table.

    Un modèle en danger ?

    « C’est de la la merdeScheißdreck, Scheißemerde ! » On a tous en mémoire les la vociférationGebrüllvociférations de Jean-Pierre Coffe quand il jetait, en directliveen direct, des saucisses industrielles à travers le studio. Avec ses les lunettes (f/pl) coloréeshier: buntes Brillengestelllunettes colorées, il était, des années 1980 à 2010, l’invité incontournablehier: regelmäßigincontournable des émissions de télévision. Sa spécialité : la la bonne bouffegutes Essenbonne bouffe. Le combat de Coffe contre la la malbouffeJunkfood, Dreckfraßmalbouffe ne se limitait pas à dénonceranprangerndénoncer les excès de l’industrie agroalimentaireLebensmittelagroalimentaire. Il exhorter àermahnen zuexhortait les Français à la convivialité,s’entourer desich umgeben mit s’entourait de fumeurs de cigares, d’humoristes. Bref, il était une des incarnations les plus parfaites du bon vivant.

    Le combat contre la malbouffe n’est pas encore gagné, malgré les campagnes du ministère de la Santé. L’l’obésité (f)Adipositasobésité et le le surpoidsÜbergewichtsurpoids continuent de  progresser. Mais quelques kilos en trop n’ont jamais dérangé les vrais bons vivants.

    Ce qui les enquiquinernervenenquiquine vraiment, ce sont les rabat-joie : les buveurs d’eau, les véganes, les moralistes. Emmanuel Macron vient d’ailleurs de choisir son camp : il a refusé de soutenir officiellement un Dry January (janvier sobrenüchternsobre) à la française en 2020. Cette initiative, née en Grande Bretagne, invite à tirer un trait sur qceinen Strich unter etw. ziehentirer un trait sur l’alcool pendant tout le mois de janvier.

    Les 43 personnalités qui ont signé une la tribuneKolumnetribune contre le mois sans alcool dans le journal Le Figaro, ont intitulé leur le brûlotStreitschriftbrûlot : « Arrêtez de culpabiliserSchuldgefühle erzeugenculpabiliser les amateurs de vin ! ». Les bons vivants se rebifferaufbegehrense rebiffent contre les culpabilisations de tout poilaller Artde tout poil.

    « Arrêtez de se priververzichtenvous priver »

    Les trois copains qui ont fondé la marque Gueuleton avec des bars, des rôtisseries et des boutiques, ne se sentent coupables de rien. Dans leur web-série, ces bons vivants conduisent leur 2 CV, béret basque sur la tête et cigare aux la lèvreLippelèvres. Ils pêchent la la truiteForelletruite, chassent la la griveDrosselgrive, grillent des quartiers de boeuf entiers. Ils ont nommé leur compte Instagram « #pasvegan ».

    Le combat entre le véganisme et une certaine idée de l’art de vivre à la française est féroceunbarmherzigféroce. On ne compte plus les vitrines de boucheries saccagé,everwüstetsaccagées par des commandos de véganes extrémistes. Un le rapportBerichtrapport gouvernemental de 2019 comparait même ce courant au terrorisme.

    Dans sa Lettre ouverte aux mangeurs de viande, le politologue Paul Ariès prend position. sonner la mortdas Ende einläutenEn sonnant la mort de l’agriculture, les véganes seraient les représentants de l’industrie et des biotechnologies. Ariès invite les l’omnivore (m)Allesfresseromnivores à devenir des mangeurs plus consciencieux, en refusant les produits de l’l’élevage (m) industrielMassentierhaltungélevage industriel.

    Dans son livre Arrêtez de vous priver, le docteur David Khayat va plus loin. Il partir en croisadeeinen Kreuzzug führenpart en croisade contre tous les interdits alimentaires : la viande, la la graisseFettgraisse, le sucre, les le laitageMilchproduktlaitages, le gluten, contre les diktats de la la minceurSchlankheitminceur et du sport. Pour lui, chacun de nous possède une « liberté de santé », c’est-à- dire qu’il peut prendre certains risques. Sa devise est de ne pas avoir le regret de s’être privé. à condition devorausgesetztÀ condition de se montrer raisonnable.

     

    L'humour en danger, quelques bons vivants notoires et une rencontre avec Stéphane Jégo, le chef de L’Ami Jean à Paris... À retrouver dans le numéro 11/21 d'Écoute.

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